Terrain de Château-sur-Epte – Focus

Introduction

Acquérir un terrain pour créer une zone sanctuaire dédiée à la biodiversité, ce n’est pas simplement un acte d’achat suivi d’un autre acte, celui de planter des arbres. Un espace « ouvert » comme un champ ou une pâture laissé libre de toute intervention humaine a la capacité de se « refermer » si on lui laisse le temps. En général, en quelques décennies, les arbres viennent recoloniser le lieu naturellement.
Nous pourrions laisser faire la nature, car elle sait très bien le faire. Nous avons cependant une intention. Par les plantations citoyennes que nous organisons, nous avons à cœur de recréer du lien entre l’Homme et le Vivant pour une simple raison : on protège mieux ce que l’on connaît.
L’autre raison est qu’en raison du dérèglement climatique, il est difficile de prévoir quelles essences vont, à terme, s’adapter aux nouvelles conditions. Par la plantation de dizaines d’essences indigènes, nous augmentons la biodiversité végétale, et espérons donner un surplus de résilience à ces espaces.
Aujourd’hui, nous mixons sur un même terrain des plantations citoyennes (haies et bosquets) et libre évolution pour laisser le Vivant retrouver ses dynamiques libres de toutes contraintes. Nous rendons des espaces à la nature et en devenons les gardiens.
Mais avant même de planter, certaines réflexions sont à mener pour prendre en considération toutes les interactions déjà présentes dans l’environnement dans lequel nous souhaitons implanter un sanctuaire. Rappelons-le et restons humbles : nous ne créons que le cadre pour accueillir la biodiversité végétale et animale.
Ce que nous vous présentons ici n’est qu’une partie résumée du travail de recherches que nous réalisons avant toute action et prise de décision sur un terrain.

Date d’acquisition : 21 janvier 2023

Les relais locaux : Judith Wambacq

judith.wambacq@semeursdeforets.org

Château-sur-Epte – Généralités sur le territoire

Château-sur-Epte est situé dans le département de l’Eure, en région Normandie. D’une altitude moyenne de 133m, la commune tire son nom du château médiéval construit en 1097 par le duc de Normandie et dont les vestiges se dressent encore sur le bourg.

La commune est limitrophe du Val-d’Oise, dont elle est séparée par la rivière de l’Epte.

Le climat et la pluviométrie

Le climat de Château-sur-Epte est de type océanique dégradé des plaines du Centre et du Nord, sans saison sèche et à été tempéré.

La place de la forêt dans l’Eure

Les forêts dans l’Eure représentent près du quart de la surface du département. Avec un taux de boisement de 23 % (132 775 hectares – 86,5 % sont des forêts privées*), il s’agit du département le plus boisé de la Haute-Normandie, avec des forêts massivement implantées dans les vallées.

Les feuillus représentent la grande majorité des essences de l’Eure à 85 % avec une prédominance de chênes suivie du hêtre. Les résineux (15%) sont constitués principalement de pin sylvestre, de douglas et de pin laricio.


* Source :
Les forêts dans l’Eure – Forêt – Nature – eau et nature – Environnement – Actions de l’État – Les services de l’État dans l’Eure

Les essences forestières locales présentes dans l’Eure

proposées par le par le parc naturel régional des boucles de la Seine Normande

Aulne glutineux
Peuplier tremble

Noisetier

Saule marsault
Bouleau verruqueuxPeuplier noirSorbier des oiseleursSaule roux
Bouleau pubescentSaule blancAubépine monogyneTroène commun
Charme communOrme champêtreBuisViorne lantane
Châtaignier communAlisier torminalCornouiller mâleViorne obier
Chêne pédonculéBourdaineCornouiller sanguin
Chêne sessileFusain d’EuropeÉglantier
Érable champêtreHouxNéflier
HêtreMerisierSaule cendré
If communNerprun purgatifSaule des vanniers

Nous nous inspirons de ce qui existe déjà sur le territoire pour recréer des espaces forestiers exclusivement composés d’essences indigènes. Lors des plantations citoyennes, nous plantons principalement des « feuillus ».

Les espèces florales et arbustives invasives présentes sur le territoire à surveiller

  • La Jussie se développe dans les rivières et les plans d’eau, ainsi que dans les prairies humides. Elle monopolise totalement le milieu, diminue la diversité d’espèces locales et peut amplifier les phénomènes d’inondation.
  • Le Sénéçon du Cap colonise les zones urbaines, les friches et les terrasses alluviales de la vallée de la Seine. Toxique pour le bétail.
  • Le Buddleia de David colonise de nombreux milieux naturels et semi-naturels, menaçant la flore locale.
  • La Renouée du Japon se rencontre fréquemment sur les talus de bords de route et de voies ferrées ainsi que dans les terrains vagues.
  • L’Ailante glanduleux, peu exigeant et à croissance rapide, entraîne une baisse locale de la biodiversité en provoquant la disparition directe des autres plantes.
  • La Balsamine de l’Himalaya, très compétitive, monopolise toutes les ressources indispensables au bon développement des plantes locales.
  • La Berce du Caucase est une plante envahissante qui présente un risque pour la santé. Le contact avec la sève, combiné avec l’exposition à la lumière, cause des lésions à la peau.
  • La griffe de sorcière, lorsque ses feuilles se décomposent, libère des substances chimiques qui modifient les propriétés du sol.
  • L’herbe de la Pampa transforme profondément le milieu et peut faire disparaître tout ou une partie des autres espèces.

Sources : Les espèces exotiques envahissantes de Normandie | Conservatoires d’espaces naturels de Normandie – Agglo Seine Eure

Le terrain de Château-sur-Epte : spécificités

Le terrain se trouve sur la commune de Château-sur-Epte (27420), en limite du bourg.

La France a aménagé l’intégralité de son territoire. On ne peut pas faire n’importe quoi, n’importe où. Et même planter des arbres est réglementé. Il nous faut connaître les différents zonages pour savoir ce qu’il est possible de faire ou non.

Le zonage au PLU

La parcelle est classée en zone naturelle. Elle est soumise au risque d’inondation et à une servitude relative aux sites inscrits et classés de la vallée de l’Epte.

Les zones de protection

Zone Natura 2000 : le terrain n’est pas directement sur une zone Natura 2000. Toutefois, il jouxte une zone Natura 2000 directive Habitat (la vallée de l’Epte).

Zone ZNIEFF (Zone Naturelle d’Intérêt Écologique, Faunistique et Floristique) : Le terrain n’est pas en zone ZNIEFF. Cependant, la parcelle est à proximité de plusieurs ZNIEFF 1 et 2 à l’est (La Vallée de l’Epte de Gisors à la Confluence, Les prairies le bois le Houx). Elle borde également à quelques centaines de mètres le parc naturel régional du Vexin français.

Zone humide : le terrain n’est pas en zone humide.

Zone de débroussaillement : le terrain n’est pas dans une zone de débroussaillement.

Site classé : le terrain est soumis aux servitudes relatives aux sites inscrits et classés (AC2), ici de la Vallée de l’Epte.

L’évolution du terrain au cours des années depuis 1950

Connaître l’espace et son évolution dans le temps est toujours pertinent pour mieux saisir ce que le terrain a vécu. Nous avons la chance d’avoir la possibilité d’accéder à des photos d’avion ou satellites depuis le début des années 1950.

Premières observations (janvier 2023)

Le terrain a été fauché très régulièrement ces dernières années. Il est plat d’un seul tenant non clôturé, en bordure d’une route départementale à l’ouest, et d’une voie verte à l’est. Une partie de la parcelle (au nord) s’est régénérée naturellement sur des remblais. Ce boisement est

composée essentiellement de saules, de quelques chênes pédonculés, frênes et noisetiers en spontané. Le milieu dans cet espace est plutôt humide avec un beau taillis et quelques arbres en futaie. Au-delà de la route départementale se trouve une zone agricole sur plusieurs centaines d’hectares en légère pente sans haie, ni bosquets à perte de vue. L’agriculture pratiquée semble conventionnelle.

Après premières informations et analyses : le sol est limoneux à limoneux-argileux avec présence de calcaire.

Vues du terrain

Environnement du terrain

A l’ouest : une route départementale et une ligne électrique longent le terrain. De l’autre côté de la route, de grandes parcelles agricoles sans haie, ni arbre sur plusieurs centaines d’hectares.

Au nord : régénération naturelle composée essentiellement de saules, de quelques chênes pédonculés, frênes et noisetiers. La zone est déjà en sous-bois et repose sur des remblais. Le terrain est encastré entre deux zones urbaines.

A l’est : de l’autre côté de la voie verte, on retrouve une parcelle boisée, classée en « zone naturelle habitat ». Sur le terrain, quelques arbres en ligne dans un semblant de haie qui se délite.

Au sud : la parcelle au sud du terrain est classée zone urbaine. On y trouve une maison, bordée d’une haie de tuyas.

Pas de point d’eau sur le terrain, mais le milieu et le sol sont humides.

Vues autour du terrain

Le relevé des arbres et arbustes spontanés existants sur le terrain et alentours

(février à avril 2024)

  • Chêne pédonculé (Quercus robur) – indigène
  • Frêne commun (Fraxinus excelsior) – indigène
  • Saule à grandes feuilles (Salix appendiculata) – indigène
  • Aubépine monogyne (Crataegus monogyna) – indigène
  • Sureau noir (Sambucus nigra) – indigène
  • Peuplier noir (Populus nigra) – indigène
  • Saule blanc (Salix alba) – indigène
  • Noisetier (Corylus avellana) – indigène
  • Tilleul à petites feuilles (Tilia cordata) – indigène

Le relevé des essences sur le terrain et aux alentours permet de mieux déterminer les espèces qui se plaisent naturellement dans un endroit. Nous répertorions à la fois les espèces indigènes, mais aussi notons la présence d’invasives si elles viennent à apparaître sur le terrain. Ce sont des indications sur ce qui se passe dans le sol et ce qu’il a vécu. Notre objectif est de modéliser ce qui existe déjà, en ne conservant que les essences indigènes. Nous recoupons les relevés terrain avec la riche documentation des différents organismes d’État dédiée au territoire. Notre choix se porte ensuite sur des essences locales et adaptées au sol pour accroître la diversité végétale, avec un souci de reconstitution des étagements, de l’arbuste à l’arbre de canopée.

Les essences forestières indigènes choisies pour les plantations

11 essences

Peuplier noirChêne pédonculéSaule blancSaule roux
Saule pourpreNoisetierAubépine monogyneNerprun purgatif
Cassissier sauvageAjonc d’EuropeGenêt à balais

Notre projet pour le terrain

Ce terrain d’1,9 hectare est situé en bordure d’une petite commune rurale, en face d’une grande zone agricole sans haie, ni bosquets. Une plantation a permis de créer de larges haies en bordure du terrain tout en respectant des limites de plantation obligatoires par rapport à la route départementale, à la ligne électrique, à la voie verte et à la parcelle voisine au sud. L’objectif est déjà de recréer des haies multistrates (du buisson à l’arbre de canopée) pour créer une zone tampon entre la zone agricole à l’ouest et les zones déjà protégées à l’est.

Le terrain n’est pas amené, même s’il n’est pas clôturé, à être visité ni visitable.

Une plantation : mars 2023 – 500 arbres pour clôturer le terrain par des haies. Le centre est laissé en libre évolution.